“Bouboul”
huile sur toile – format 65 x 81 cm
Armand Avril
né à Lyon en 1926
“Je vis dans le bordel. C’est impératif, sinon l’inspiration ne me vient pas. Chez moi, ça ne doit pas être rangé ; c’est comme l’atelier de Bacon. C’est invivable pour les autres, mais c’est ma façon de vivre et de créer”.
Armand Avril est né à Lyon en 1926. Son père, collectionneur d’art africain et artiste, participe aux expositions du groupe Témoignage. Il pousse régulièrement son fils dans les musées, et lui transmet sa passion pour l’art et les objets. En 1941, Armand Avril part dans le sud pour devenir berger, ne se séparant jamais de son cahier de croquis et de son livre sur l’histoire de l’art. Son père, arrêté par la gestapo, sera déporté et décèdera en 1944.
Entre 1945 et 1956, Armand exerce alors différents métiers dont celui de plâtrier-peintre. Il débute en s’essayant à la peinture en copiant les classiques du musée des Beaux-Arts ou du musée Guimet. En 1957, il expose au Salon du Sud-Est ses créations colorées, inspirées de ses maîtres (Dufy, Bonnard et Matisse), dans le style Cottavoz ou Fusaro.
Au cours d’un voyage au Sénégal en 1960, il rencontre le peintre Jean Arène, qui lui fait découvrir le village de Cotignac dans le Var, où il s’installera en 1985, et lui présente Louis Pons, peintre et assembleur d’objets. Il découvre et s’intéresse alors aux travaux de Gaston Chaissac et de Kasimir Malevitch. Sa carrière prend alors un tournant dans ses choix artistiques.
En 1968, alors qu’il fête la victoire d’un club de rugby dans lequel il joue depuis 14 ans, il taille des morceaux de bouchons en liège et les installe dans des casiers d’imprimeurs. Ce montage, exposé au Salon du Sud-Est, est remarqué par le marchand et collectionneur Paul Gauzit, qui lui offre sa première exposition dans la galerie lyonnaise Lutrin en 1970 (Galerie qui ne cessera de l’exposer tout au long de sa carrière). Son nouveau mode d’expression : bouchons de bouteilles, pinces à linge, éléments de jouets d’enfants, boules de croquet, filasse, glu, clous, boîtes de conserves vides, touches de piano, capsules, morceaux de bois, de tissus ou de cartons. Il scie, coupe, organise, colle et peint… Tous ces objets délaissés sont pour lui un source d’inspiration sans fin.
Son art s’apparente à l’art singulier ou à l’art brut, proche des «arts primitifs» ou «arts premiers» chers aux surréalistes dont il fait collection, en particulier l’art africain. Il s’inspire notamment des objets de culte de l’artisanat africain et océanien, de rites primitifs avec leurs personnages protecteurs à partir de 1971. L’artiste se laisse guider pas sa spontanéité, sans réelle préparation. Il utilise des couleurs vives et un dessin naïf qui l’engage dans une filiation à Dubuffet et à l’art brut. Mais à la différence des artistes de l’art brut, « Avril n’est pas sans culture (…), mais au plein de sa culture ». Vingt cinq ans plus tard, lors d’un voyage en Indonésie, Avril découvre une similitude entre certains de ses assemblages et les tapisseries traditionnelles. En 1985, une exposition organisée par Alphonse Chave dans sa galerie de Vence, l’inscrit dans le sillage de Dubuffet et de l’art brut.
Il est cependant difficile de saisir toute l’intensité de l’artiste et encore plus difficile de le classer dans un mouvement artistique en particulier tant son style évolue en un style qui lui est propre. Il existe donc un “mystère Avril”. Le musée des Beaux-Art de Lyon dit de lui “l’approcher est l’entreprise la plus aisée du monde. Le saisir, le toucher même, relève de la chimère” témoignant de l’unicité de l’artiste et de sa complexité remettant en cause les règles du jeu au sein des sphères artistiques comme Duchamps avant lui. Avril continue son œuvre que l’on peut qualifier de prolifique et singulière éloignées des codes et de la mode. On peut voir dans sa maison-atelier un magnifique « bric-à-brac » où le moindre espace saturé d’objets révèle l’univers intérieur de cet artiste inclassable. Ainsi, ” Avril entre donc au musée. On peut lui faire confiance, il s’en tirera très bien. Mais le musée, lui, ne s’en sortira pas indemne »
Ses oeuvres font aujourd’hui partie de l’exposition permanente du musée des Beaux-Arts de Lyon.